Le voyant

de Jérôme Garcin

Quatrième de couverture:

Né en 1924, aveugle à huit ans, résistant à dix-sept, membre du mouvement Défense de la France, Jacques Lusseyran est arrêté en 1943 par la Gestapo, incarcéré à Fresnes puis déporté à Buchenwald. Libéré après un an et demi de captivité, il écrit Et la lumière fut et part enseigner la littérature aux Etats-Unis, où il devient «The Blind Hero of the French Resistance». Il meurt, en 1971, dans un accident de voiture. Il avait quarante-sept ans. 

Mon avis:

Ce texte retrace la vie de Jacques Lusseyran, mais plus qu'une biographie, c'est un hommage que rend ici Jérôme Garcin. On sent que l'auteur veut rendre à cet homme oublié par la France la notoriété et les honneurs qui lui sont dus. Cette impression est très forte à la lecture et on ne peut que voir nous aussi à quel point ce fut un homme d'exception.
Il émane manifestement de lui une force, une énergie qui le fait rayonner déjà tout petit. Son univers familial y est certainement pour beaucoup, mais j'aime beaucoup la philosophie avec laquelle il accepte son handicap et en fait quasiment un don. Il est entouré de personnes fiables et généreuses, les égoïstes et les profiteurs ne restant pas dans le sillage d'un aveugle. Au-delà de l'aspect mystique, il est intéressant de réaliser à quel point il peut finalement bien mieux voir que ses amis voyants.

Il va prendre une place importante dans l'organisation de la jeunesse résistante. L'hommage s'étend d'ailleurs à tous les jeunes résistants morts pour la France et si vite oubliés. J'ai particulièrement apprécié le long passage où il parle des dernières lettres de ces jeunes résistants fusillés entre 1941 et 1944. C'est très émouvant de lire la force de leur conviction, leur capacité à se battre encore mais aussi à aimer, à comprendre et à pardonner.
" Ce qui frappe, c'est que jamais la main ne tremble. Ces gamins ont un courage fou."

Il est trahi, arrêté déporté. Dans les camps, alors que son handicap devrait signer son arrêt de mort, il arrive à en faire un atout et à survivre. Certains passages sont là encore poignants, notamment la lettre qu'il écrit à ses parents de Buchenwald.
  " J'ai appris ici à aimer la vie et vous aimer plus que jamais."

Deux petits bémols pour moi cependant. Le premier concerne notre héros. Même si je ne peux imaginer ce que c'est de continuer à vivre en traînant ses fantômes quand on est un survivant, j'ai eu du mal à accepter l'attitude qu'il a avec ses enfants. Lui qui a été tant porté par ses parents n'arrive apparemment pas à créer de lien avec eux. A leur transmettre une petite part de sa lumière.
Le second concerne l'auteur. Il cite Lusseyran dans Et la lumière fut: "Je ne vais pas vous montrer Buchenwald, personne n'a jamais pu le faire. " comme une réponse aux cinéastes comme Spielberg qui " ont cru pouvoir représenter ce qui est innommable : la Shoah, filmer les camps d'extermination comme un parc de dinosaures ou une mer de requins..." J'ai trouvé dommage, voire un peu déplacé ce jugement sur un artiste. L'art permet de représenter des choses très diverses, y compris l'innommable! (Et puis j'adore Spielberg et je trouve que La liste de Schindler est un petit bijou!)

Enfin, j'ai apprécié les mots rajoutés par l'auteur dans la postface à l'occasion de l'édition en poche de ce livre, permettant de remettre certaines choses à leur place, de revenir sur certaines erreurs, certains mots, de nous confier également des anecdotes et des rencontres qui ont eu lieu suite à la sortie du livre.

Je ne savais rien de Jacques Lusseyran et ce fut une belle découverte !

Je remercie les éditions Folio pour ce partenariat!

Commentaires

  1. Un très bel avis, qui me donne envie de lire cet essai.
    D'ailleurs il est dans ma pal.

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